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Pour faire sa carte grise en 2018, en plus des pièces justificatives constituant le dossier de sa demande, le propriétaire d’une voiture ou d’un deux-roues doit se munir… d’une bonne dose de patience. Depuis le mois de novembre dernier, l’Etat a en effet mis en place un Plan “préfecture nouvelle génération” visant à moderniser et faciliter les démarches : fini, le rendez-vous à la préfecture, désormais c’est en ligne que tout se passe. Plus précisément, sur le site Internet de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS). Problème : un bug du site a grippé la machine. De nombreux témoignages font ainsi état de “dossiers bloqués” depuis des semaines.
Il y a d’abord ceux qui ne parviennent tout simplement pas à accéder au site Internet de l’ANTS (immatriculation.ants.gouv.fr), très souvent saturé. Ceux-là voient alors leur demande bloquée par une page blanche ou un message de bug. Puis il a ceux qui ont fait dérailler la machine à cause d’une erreur dans le renseignement de leur état-civil ou d’une pièce justificative mal scannée. Ce qui bloque leur dossier, sans possibilité de modification et ce, pour une durée indéterminée. Quoi qu’il en soit, le résultat est le même : l’accès au sésame, la carte grise, est barré.

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Anthony est plombier-chauffagiste à Grasse, dans les Alpes-Maritimes. Il a fait toutes les démarches pour obtenir le certificat d’immatriculation de la voiture d’occasion qu’il s’est achetée en décembre pour son travail. Mais plusieurs semaines plus tard, son dossier est toujours “en attente”, indique-t-il à Marianne. Il a bien tenté de joindre le Centre d’expertise et de ressources des titres (CERT), qui traite les contentieux, mais sans succès. Le certificat provisoire d’immatriculation qu’il détient depuis son achat n’étant valable qu’un mois, le voilà donc dans l’illégalité : “Mon activité m’oblige à utiliser mon véhicule pratiquement chaque jour de la semaine, même sans papiers, c’est hallucinant d’être poussé à l’illégalité par l’Etat lui-même !”
“Sans ce document, on ne peut pas circuler légalement. Certains ont été mis à l’amende, d’autres ont vu leur véhicule saisi, amené à la fourrière, alors qu’ils ne sont pas fautifs. Les démarches, ils les ont pourtant faites”, explique à Marianne maître Jean-Marc Descoubes, représentant de quelques-uns des mécontents, qu’ils soient de simples usagers ou des professionnels du secteur automobile.
Cette situation s’éternise depuis le mois de novembre, signale l’avocat. Pourtant, début décembre, il a tenté d’employer les grands moyens pour pousser le ministère de l’Intérieur à l’action. Au nom d’une dizaine de concessionnaires automobiles qui s’estimaient floués par ces retards, il dépose alors un référé devant le tribunal administratif de Paris afin d’obtenir “dans les plus brefs délais” les “plus de 100.000 certificats d’immatriculation en retard”. Un chiffre reconnu à ce moment-là par le ministère de l’Intérieur. Face à la promesse de ce dernier d’organiser des “réunions de crise”, le référé sera retiré. Quelques jours plus tard, une petite partie du réseau sera effectivement “débloquée”. Une victoire ? Pas vraiment. Il ne s’agit que du serveur consacré aux professionnels (garages, concessionnaires, stations de lavage) habilités par la préfecture à faire les demandes de cartes grises pour les particuliers. “En attendant, pour les particuliers, c’est toujours la même galère”, peste Me Descoubes.
Un constat amer que partage Pierre Chasseray, délégué général de l’association 40 millions d’automobilistes. “Dire qu’il y a encore plusieurs milliers de dossiers en suspens, ce serait faire une estimation plutôt faible”, juge-t-il aujourd’hui. Depuis le mois de novembre, les appels de détresse sur ce sujet ne cesseraient d’affluer au siège de son organisme. “On aide au mieux les particuliers, on tente de les aiguiller vers des avocats ou vers certains recours. Mais le problème ne peut être résolu que par le ministère. Face à un site défaillant, certainement à cause d’un lancement trop précipité, on ne peut rien faire”, regrette-t-il auprès de Marianne.
Au ministère de l’Intérieur, qui a sous sa coupe l’ANST mise en cause, on veut porter un regard plus “mesuré” sur ces problèmes. Si l’on concède de nombreuses “anomalies” dues à un “surcroît de connexions” et de “demandes” en ligne, on tient à insister sur les efforts entrepris pour régler la situation. “Tous les quinze jours, des correctifs sont installés pour améliorer la situation”, nous affirme-t-on. Mais alors, combien de dossiers sont encore en souffrance à cause de ces “bugs” ? “Impossible de faire une estimation, nous assure Beauvau. Certains dossiers sont aussi bloqués parce qu’ils ne répondent pas aux règles ou parce que les pièces complémentaires demandées n’ont pas été jointes. Dès lors, difficile de faire une estimation précise en départageant chaque cas de figure”. Curieux car en décembre, une estimation avait pu être établie…
Le guichet de la préfecture consacré à l’immatriculation des véhicules étant définitivement fermé, les particuliers n’ont donc d’autre choix pour obtenir leur carte grise que de faire appel aux services d’entreprises privées du secteur automobile. Le serveur informatique de celles-ci étant, lui, en état de marche. “Pour ces particuliers, ça a tout de même un coût supplémentaire conséquent, nous explique Elie Vecchi, cogérant de l’entreprise Carte grise 23, basée dans la Creuse, qui vend ses services aux personnes en difficulté face à cette révolution numérique. Certains garages facturent la demande de carte grise plus de 50 euros. Alors qu’il s’agit simplement d’une manipulation informatique qui ne prend pas plus de 5 à 10 minutes !” Une somme qui vient s’additionner à celle de la réalisation de la carte grise elle-même, facturée par l’Etat 235 euros. Pallier les errements numériques de l’Etat, cela a un prix…
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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne

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